Enquête sur les origines du SARS-CoV-2. Par le professeur Jeffrey Sachs
Par le professeur Jeffrey Sachs, directeur du Centre pour le développement durable à l’Université de Columbia, président du Réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies, et ancien président de la Commission Lancet sur le COVID-19
Introduction
Les origines du SARS-CoV-2, le virus responsable de la pandémie de COVID-19, demeurent l’une des questions les plus cruciales et non résolues de notre époque.
En tant que président de la Commission Lancet sur le COVID-19, j’ai examiné de près les facteurs scientifiques, politiques et institutionnels entourant cette question.
Mes investigations, appuyées par des demandes d’accès à l’information (Freedom of Information Act, FOIA), des documents divulgués et le travail de journalistes d’investigation, pointent vers des preuves troublantes suggérant que le virus pourrait provenir de recherches biotechnologiques financées par les États-Unis, plutôt que d’un débordement zoonotique naturel.
Cet article expose les principales préoccupations scientifiques et institutionnelles, soulignant l’urgence d’une transparence et d’une enquête indépendante.
Les caractéristiques uniques du SARS-CoV-2
Le SARS-CoV-2 est un sarbécovirus, un virus dérivé des chauves-souris appartenant au même sous-genre que le virus responsable de l’épidémie de SRAS de 2003-2004.
Cependant, le SARS-CoV-2 possède une caractéristique distinctive qui le distingue :
un site de clivage furinique (FCS) sur sa protéine de spicule.
Ce site, composé de quatre acides aminés, permet à la protéine de spicule d’être clivée, facilitant l’entrée du virus dans les cellules humaines et augmentant considérablement son pouvoir infectieux.
Cette caractéristique a été un moteur majeur de la pandémie mondiale, qui a entraîné environ 18 millions de décès.
Fait notable, le SARS-CoV-2 est le seul sarbécovirus connu à posséder un site de clivage furinique.
Les autres virus de type SRAS, y compris le virus SRAS original, n’ont pas cette particularité.
La présence du FCS soulève une question cruciale : d’où provient-il ? La réponse à cette question est essentielle pour comprendre les origines du virus.
Le rôle des recherches financées par les États-Unis
Des preuves suggèrent que le site de clivage furinique pourrait avoir été introduit par des recherches de gain de fonction (GOF) financées par les Instituts nationaux de la santé (NIH) des États-Unis, plus précisément par l’Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIAID), dirigé par le Dr Anthony Fauci.
Des documents obtenus grâce à des demandes FOIA et des fuites révèlent que des projets financés par le NIH, canalisés par l’EcoHealth Alliance, visaient à insérer des sites de clivage furinique dans des virus de type SRAS.
Ces recherches ont été menées en collaboration avec l’Institut de virologie de Wuhan (WIV), une institution clé impliquée dans le débat sur les origines.
L’EcoHealth Alliance, une ONG basée aux États-Unis, a servi de canal pour le financement de l’USAID et de l’Agence des projets de recherche avancée de défense (DARPA) du Pentagone vers le WIV.
Une proposition de 2017 adressée à DARPA décrivait explicitement des plans pour collecter plus de 180 souches virales jusqu’alors non signalées et insérer des sites de clivage protéolytique, tels que le FCS, dans des virus qui en étaient dépourvus.
Cette proposition, révélée uniquement par des fuites, fournit un plan pour créer un virus présentant des caractéristiques remarquablement similaires à celles du SARS-CoV-2.
La justification avancée pour ces recherches incluait le développement de vaccins contre des virus de type SRAS potentiellement dangereux.
Cependant, la possibilité d’applications en tant qu’arme biologique ne peut être exclue, car la frontière entre biodéfense et bio-attaque est souvent floue.
Quelle que soit l’intention, la nature dangereuse de ces travaux – créer des virus hautement infectieux – exige un examen rigoureux.
Le récit d’une origine naturelle
Au début de 2020, un récit a émergé affirmant que le SARS-CoV-2 avait une origine naturelle, probablement par un débordement zoonotique dans un marché humide de Wuhan.
Ce récit a été officialisé dans un article de mars 2020 publié dans Nature Medicine, intitulé « L’origine proximale du SARS-CoV-2 », qui affirmait que le virus n’était « pas une construction de laboratoire ».
Cet article, largement promu par le Dr Fauci, citait un article de 2014 pour soutenir son affirmation que les caractéristiques du virus étaient différentes de tout virus précédemment signalé – une affirmation qui ignorait des recherches plus récentes et pertinentes.
Des demandes FOIA ont révélé par la suite que les auteurs de l’article, un petit groupe de virologues ayant des liens avec le NIH et l’EcoHealth Alliance, avaient exprimé en privé des doutes sur l’hypothèse de l’origine naturelle.
Le 1er février 2020, lors d’un appel secret (désormais dévoilé grâce au FOIA), ces virologues ont exprimé leur stupéfaction face au site de clivage furinique, certains estimant à 80-20 ou 50-50 la probabilité qu’il provienne d’un laboratoire, tandis qu’un autre déclarait ne pas pouvoir imaginer comment la nature aurait pu produire cela.
Pourtant, quatre jours plus tard, un brouillon d’article supervisé par le NIH affirmait de manière définitive une origine naturelle – un revirement que je qualifie de « définitivement étrange ».
Ce changement rapide, sans nouvelles preuves, suggère une narrative orchestrée plutôt qu’une quête de vérité.
Comme l’a démontré l’excellent travail de l’organisation U.S. Right to Know et de la journaliste d’investigation Emily Kopp, les virologues ont d’abord reconnu en privé une possible origine en laboratoire avant de promouvoir publiquement une origine naturelle, sans justification scientifique apparente pour ce changement.
Le rôle de l’EcoHealth Alliance et de Peter Daszak
L’EcoHealth Alliance a joué un rôle central en canalisant les fonds américains vers le WIV pour des recherches de gain de fonction.
Peter Daszak, président de l’EcoHealth Alliance, a été nommé président du groupe de travail de la Commission Lancet sur les origines du virus, une décision que j’ai prise en 2020 en raison de ma croyance initiale dans l’hypothèse de l’origine naturelle et de la réputation de Daszak en tant qu’expert des débordements zoonotiques.
À l’époque, j’ignorais les conflits d’intérêts de Daszak, notamment son rôle dans le financement des recherches du WIV et sa signature d’une lettre dans The Lancet rejetant l’hypothèse de l’origine en laboratoire comme une « théorie du complot ».
Au fur et à mesure que j’en apprenais davantage sur les recherches en cours et les incohérences dans les déclarations de Daszak, j’ai exigé qu’il partage ses documents de projet.
Lorsqu’il a refusé, invoquant des conseils juridiques, je l’ai démis de ses fonctions au sein de la commission.
Cette décision a suscité des critiques de la part d’autres scientifiques, dont certains, comme Jerry Kirsch de l’Université de Boston, se sont révélés être des co-investigateurs de Daszak.
Ces révélations ont mis en lumière un petit groupe très soudé de virologues ayant des liens étroits avec le NIH, qui semblaient coordonner une narrative pour minimiser la possibilité d’une origine en laboratoire.
Les actions du Dr Anthony Fauci
Le Dr Anthony Fauci, directeur du NIAID, a joué un rôle central dans la promotion de l’hypothèse de l’origine naturelle et dans la marginalisation des voix dissidentes.
Après les attentats du 11 septembre 2001, le NIAID a reçu des milliards de dollars sous la supervision de l’ancien vice-président Dick Cheney pour des programmes de biodéfense, dont certains impliquaient des recherches de gain de fonction.
Ces programmes, bien que présentés comme défensifs, soulèvent des questions sur leur potentiel offensif.
Fauci a été impliqué dans la correspondance et la collaboration avec les virologues qui ont rédigé l’article de Nature Medicine, et il est probable qu’il ait joué un rôle dans sa création.
En 2020, lorsque le Dr Robert Redfield, alors directeur des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), a suggéré en interne que le virus pourrait provenir d’un laboratoire, Fauci l’a exclu des processus décisionnels, renforçant ainsi la narrative officielle.
Ces actions, associées à la publication de documents NIH fortement caviardés – comme un rapport de 2020 de 290 pages entièrement expurgé – soulignent un manque de transparence alarmant.
Les lacunes de l’hypothèse du marché
L’hypothèse selon laquelle le SARS-CoV-2 proviendrait d’un débordement zoonotique au marché humide de Wuhan repose sur des bases fragiles.
Bien que le marché ait été un lieu où des cas précoces ont été signalés, il n’existe aucune preuve définitive que le virus y est apparu.
Les premiers cas pourraient être le résultat d’un biais d’identification – les autorités ont concentré leurs recherches sur le marché en raison d’une hypothèse initiale, mais cela ne prouve pas que le virus y est né.
En réalité, les lacunes et les incohérences dans cette théorie rendent improbable qu’elle soit concluante, et il est possible que le marché ait simplement été un lieu où des personnes infectées ont propagé le virus.
Le besoin d’une enquête indépendante
La Commission Lancet a conclu qu’il existe deux hypothèses viables pour l’origine du SARS-CoV-2 :
une fuite de laboratoire et un débordement zoonotique.
Cependant, l’absence de transparence de la part du gouvernement américain, en particulier du NIH et du NIAID, entrave la capacité à trancher.
Cette opacité est exacerbée par un manque de surveillance des grands médias, qui, contrairement à une époque précédente marquée par des reportages d’investigation rigoureux (comme ceux du New York Times dans les années 1960 et 1970), se contentent souvent de relayer la ligne officielle du gouvernement.
Ce phénomène, que des penseurs comme Noam Chomsky ont analysé depuis des décennies, reflète une création de récits orchestrée plutôt qu’une recherche de la vérité.
Les implications plus larges : Ukraine et au-delà
Les questions de transparence ne se limitent pas au SARS-CoV-2.
Des allégations concernant des laboratoires d’armes biologiques financés par les États-Unis en Ukraine, alimentées par des déclarations évasives de responsables comme Victoria Nuland en 2022, soulignent la nécessité d’une surveillance accrue.
Les documents trouvés dans ces laboratoires ont été publié sur internet par la Russie.
Tweet de Tulsi Gabbard
There are 25+ US-funded biolabs in Ukraine which if breached would release & spread deadly pathogens to US/world.
We must take action now to prevent disaster. US/Russia/Ukraine/NATO/UN/EU must implement a ceasefire now around these labs until they’re secured & pathogens destroyed pic.twitter.com/dhDTH5smIG
— Tulsi Gabbard 🌺 (@TulsiGabbard) March 13, 2022
Traduction :
Il y a plus de 25 laboratoires biologiques financés par les États-Unis en Ukraine qui, en cas de violation, pourraient libérer et propager des agents pathogènes mortels aux États-Unis et dans le monde.*
Nous devons agir maintenant pour éviter une catastrophe. Les États-Unis, la Russie, l'Ukraine, l'OTAN, l'ONU et l'UE doivent mettre en place un cessez-le-feu immédiat autour de ces laboratoires jusqu'à ce qu'ils soient sécurisés et les pathogènes détruits." 13 Mars 2022
Tous les documents liés à ces laboratoires ont été supprimés d'Internet. Si vous cliquez sur l'un des liens, les fichiers PDF ne sont plus disponibles.
Heureusement, ces documents ont été archivés et peuvent toujours être consultés." Voir les liens à la fin de l'article
Depuis l’adoption de la loi sur la sécurité nationale de 1947 et la création de la CIA, le gouvernement américain opère souvent dans le secret sur des questions de sécurité nationale, ce qui compromet la responsabilité démocratique.
Conclusion
Nous ne savons pas avec certitude d’où provient le SARS-CoV-2, mais les preuves disponibles – y compris les recherches de gain de fonction financées par les États-Unis, le rôle de l’EcoHealth Alliance, et le comportement non transparent du NIH – soulèvent des préoccupations graves.
Ce qui est clair, c’est que le public a été privé de la vérité par un mélange de récits fabriqués, de documents caviardés, et d’une réticence institutionnelle à faire preuve de transparence.
Pour protéger la santé mondiale et prévenir de futures catastrophes, une enquête indépendante est impérative.
Cette enquête doit examiner les recherches financées par les États-Unis, les activités du WIV, et les décisions prises par des figures clés comme le Dr Fauci.
Plus largement, nous devons rétablir une culture de responsabilité démocratique, où les médias et les institutions publiques recherchent la vérité plutôt que de perpétuer des récits imposés.
Les enjeux – littéralement de vie ou de mort – ne pourraient être plus élevés.
Jeffrey Sachs est directeur du Centre pour le développement durable à l’Université de Columbia, président du Réseau des solutions pour le développement durable des Nations Unies, et a présidé la Commission Lancet sur le COVID-19.
Ses remerciements vont aux journalistes d’investigation et aux scientifiques qui ont contribué à faire la lumière sur cette question critique.
Pour aller plus loin vous pouvez consulter cet article sur les armes Biologique et les laboratoires US dans le monde :
https://labcareone.blogspot.com/2025/04/reseau-mondial-darmes-biologiques.html
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