Ivermectine et le traitement de la sclérose en plaques (SEP)
Objectif :
L'étude explore l'effet neuroprotecteur de l'ivermectine (IVM) et de sa formulation nano-particulaire (nano-IVM) dans un modèle murin de sclérose en plaques (SEP) induite par la cuprizone (CPZ).
La SEP est une maladie inflammatoire et auto-immune du système nerveux central (SNC) caractérisée par une démyélinisation.
L'objectif était d'évaluer si l'IVM et la nano-IVM pouvaient atténuer les dommages à la myéline et les déficits comportementaux associés à la SEP, en ciblant la voie de signalisation TRPA1/NF-kB/GFAP.
Méthodes :
Modèle animal :
Des souris mâles C57BL/6 ont été utilisées.
La démyélinisation a été induite par l'ajout de 0,2 % de CPZ dans leur alimentation pendant 6 semaines.
Quatre groupes ont été formés : contrôle, CPZ, IVM (1 mg/kg/jour), et nano-IVM (1 mg/kg/jour).
Formulation de la nano-IVM :
Des nanoparticules lipidiques solides (SLNs) ont été synthétisées pour encapsuler l'IVM, améliorant ainsi sa biodisponibilité.
Les SLNs ont été caractérisées par leur taille, potentiel zêta, et efficacité d'encapsulation.
Tests comportementaux et histologiques :
Des tests moteurs (rotarod, pole test, open field) et des tests de sensibilité (hot plate, acetone test) ont été réalisés.
Des analyses histologiques (coloration LFB pour la myéline, H&E pour la morphologie tissulaire) et immunohistochimiques (TRPA1, NF-kB p65, GFAP, MBP) ont été effectuées.
Résultats :
Effets comportementaux :
Les souris traitées à la CPZ ont montré une perte de poids, une réduction de l'activité motrice et une augmentation de l'immobilité.
L'IVM et la nano-IVM ont amélioré ces paramètres, avec une efficacité supérieure de la nano-IVM.
Effets histologiques :
La CPZ a induit une démyélinisation marquée dans le corps calleux, visible par une réduction de la coloration LFB.
L'IVM et la nano-IVM ont réduit la démyélinisation et augmenté les niveaux de MBP (protéine basique de la myéline), indiquant une régénération ou une protection de la myéline.
Marqueurs inflammatoires :
La CPZ a augmenté les niveaux de TRPA1, NF-kB p65, et GFAP (marqueurs d'inflammation et de gliose).
L'IVM et la nano-IVM ont réduit ces marqueurs, suggérant une diminution de l'inflammation et de l'activation gliale.
Efficacité de la nano-IVM :
La nano-IVM a montré une meilleure efficacité que l'IVM standard, probablement en raison de sa meilleure biodisponibilité et de sa capacité à cibler spécifiquement les tissus affectés.
Discussion :
L'IVM a démontré des propriétés anti-inflammatoires et neuroprotectrices en réduisant l'activation de la voie TRPA1/NF-kB/GFAP, impliquée dans l'inflammation et la démyélinisation.
La formulation nano-particulaire a amélioré l'efficacité de l'IVM, offrant une protection accrue contre les dommages à la myéline et les déficits moteurs.
Ces résultats suggèrent que l'IVM et la nano-IVM pourraient être des candidats prometteurs pour le traitement de la SEP et d'autres maladies démyélinisantes.
Conclusion :
L'étude démontre que l'ivermectine et sa formulation nano-particulaire atténuent la démyélinisation et les déficits comportementaux dans un modèle murin de SEP induite par la cuprizone. Ces effets sont médiés par la modulation de la voie TRPA1/NF-kB/GFAP, réduisant l'inflammation et protégeant la myéline. Ces résultats ouvrent la voie à des études cliniques pour évaluer l'efficacité de l'IVM dans le traitement de la SEP.
Mots-clés :
Cuprizone, maladies démyélinisantes, inflammation, ivermectine, sclérose en plaques, nano-ivermectine, nanoparticules lipidiques solides, canal cationique TRPA1.
Liens :
2018 (Zabala et al) - P2X4 receptor controls microglia activation and favors remyelination in autoimmune encephalitis (Spain)
2023 (Noori et al) - Synthesis and evaluation of the effects of solid lipid nanoparticles of ivermectin and ivermectin on cuprizone-induced demyelination via targeting the TRPA1/NF-kB/GFAP signaling pathway
Pour aller encore plus loin :
L’ivermectine dans le traitement de la sclérose en plaques : Exploration approfondie des études cliniques et précliniques
La sclérose en plaques (SEP) est une maladie neurologique auto-immune complexe, qui affecte principalement le système nerveux central (SNC).
Elle se caractérise par une démyélinisation progressive de la myéline, une substance graisseuse qui protège les axones des neurones et permet la conduction efficace des signaux nerveux.
Au fur et à mesure que la myéline se détruit, la transmission des signaux nerveux devient moins efficace, entraînant une variété de symptômes neurologiques allant de troubles moteurs à des problèmes cognitifs.
La SEP est l’une des principales causes de handicap non traumatique chez les jeunes adultes, principalement les femmes âgées de 20 à 40 ans.
Les traitements actuels incluent des immunomodulateurs et des immunosuppresseurs, mais il n'existe toujours pas de cure définitive.
Cependant, la recherche dans le domaine de la neurologie continue d'évoluer, et des traitements innovants émergent, y compris l'utilisation de médicaments initialement destinés à traiter des infections parasitaires, comme l'ivermectine.
Mécanismes d’action de l’ivermectine dans la sclérose en plaques :
Une exploration scientifique
L’ivermectine est un médicament antiparasitaire bien connu, utilisé dans le traitement de diverses infections parasitaires, notamment la filariose, la gale, et l’onchocercose.
Bien qu’elle soit classée parmi les antiparasitaires, des études plus récentes ont suggéré que l’ivermectine pourrait avoir des propriétés bénéfiques dans le traitement de maladies neurodégénératives, dont la sclérose en plaques.
Cette hypothèse repose sur son action modifiant l’activité des microglies dans le système nerveux central, des cellules immunitaires impliquées dans la réponse inflammatoire dans des conditions pathologiques comme la SEP.
Interaction avec les microglies et le récepteur P2X4
Les microglies, cellules résidentes du système nerveux central, jouent un rôle clé dans l’activation immunitaire et la neuroinflammation.
Dans la SEP, l’activation excessive des microglies contribue à la démyélinisation et à la progression de la maladie.
Le récepteur purinergique P2X4, activé par des purines telles que l’ATP, est un régulateur crucial de l’activation des microglies.
Des recherches récentes ont démontré que l’ivermectine pourrait moduler l'activation de ce récepteur, entraînant un changement du phénotype des microglies, de leur état pro-inflammatoire vers un état anti-inflammatoire.
Une étude de EMBO Molecular Medicine a révélé que l'activation de P2X4 par l’ivermectine chez des souris modèles de SEP favorise la réduction de l’inflammation et augmente la capacité des microglies à phagocyter les fragments de myéline, un processus essentiel pour limiter les dommages à long terme.
Ce changement dans l'activité des microglies pourrait potentiellement favoriser la re myélinisation, un processus de réparation des lésions de la myéline, ralentissant ainsi la progression de la SEP.
Remyélinisation et neuroprotection
Le processus de re myélinisation est essentiel pour réparer les lésions causées par la démyélinisation dans la SEP.
Toutefois, la capacité naturelle du système nerveux à se réparer est limitée, surtout à un stade avancé de la maladie. L’ivermectine, par son action sur les microglies et la stimulation de la re myélinisation, pourrait offrir un moyen innovant de stimuler cette réparation.
En favorisant la phagocytose des débris de myéline, l'ivermectine pourrait créer un environnement propice à la croissance de nouvelles cellules de myéline.
Des études récentes montrent qu'une stimulation accrue de la re-myélinisation pourrait améliorer les fonctions neurologiques et réduire la progression des symptômes cliniques chez les patients atteints de SEP.
Recherches cliniques et précliniques : Un état des lieux
Bien que l’ivermectine ait montré des résultats prometteurs dans des modèles animaux de SEP, il est important de noter que les recherches cliniques chez l'homme sont encore limitées.
La plupart des études disponibles se concentrent sur l’effet de l’ivermectine sur les modèles animaux de maladies auto-immunes et neurodégénératives.
Cependant, ces résultats précliniques ouvrent la voie à une évaluation plus approfondie dans des essais cliniques humains.
Études in vitro et in vivo
Les premières études in vitro ont montré que l’ivermectine pourrait influencer l’inflammation en modifiant les réponses immunitaires des cellules du SNC.
Par exemple, des recherches ont montré que l’ivermectine inhibe l'activation des cytokines pro-inflammatoires, qui jouent un rôle clé dans l’inflammation neuronale.
Dans des études animales, l’administration d’ivermectine a montré une réduction significative de l’inflammation et de la démyélinisation, ce qui a ouvert de nouvelles perspectives pour l'utilisation de ce médicament dans les maladies neurodégénératives.
Néanmoins, la grande majorité de ces recherches a été réalisée dans des modèles expérimentaux de méningo-encéphalite auto-immune, une condition qui partage certains mécanismes avec la SEP.
Bien que ces résultats soient encourageants, les essais cliniques doivent confirmer l'innocuité et l’efficacité de l’ivermectine pour traiter la SEP chez les humains. Des études cliniques randomisées, contrôlées et à long terme sont nécessaires pour obtenir des données robustes et fiables.
Sécurité et efficacité : Quels risques pour les patients atteints de SEP ?
L’ivermectine est généralement bien tolérée lorsqu’elle est utilisée dans le traitement des infections parasitaires.
Toutefois, son utilisation à long terme dans des conditions neurologiques comme la SEP nécessite une évaluation minutieuse des risques et des bénéfices.
Bien que les effets secondaires de l'ivermectine soient généralement rares et bénins, des effets indésirables plus graves peuvent survenir chez les patients présentant des comorbidités, telles que des troubles neurologiques ou des troubles immunitaires.
Des études sur les interactions médicamenteuses entre l’ivermectine et les traitements immunosuppresseurs fréquemment utilisés dans la SEP, tels que les interférons et les modulateurs de la réponse immunitaire, sont également nécessaires pour éviter des complications potentielles.
L’un des principaux risques d’un traitement à l’ivermectine serait l'impact sur l’immunité, en particulier pour les patients sous traitement immunosuppresseur pour la SEP.
Une diminution excessive de la réponse immunitaire pourrait augmenter la susceptibilité aux infections, ce qui représenterait un compromis important pour les patients vulnérables.
Ces risques doivent être équilibrés avec les bénéfices potentiels du traitement, en particulier dans le cadre d'un traitement adjuvant pour la gestion de la SEP.
Perspectives d’avenir et applications cliniques
Les recherches sur l’ivermectine dans le contexte de la sclérose en plaques sont encore émergentes, mais elles pourraient ouvrir des portes pour le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques.
Si l’ivermectine s’avère efficace dans des études cliniques plus poussées, elle pourrait devenir une option complémentaire dans le traitement de la SEP, en particulier pour les patients qui ne répondent pas bien aux thérapies actuelles.
Cependant, d'autres médicaments immunomodulateurs et neuroprotecteurs continuent d'être explorés pour traiter la SEP. Parmi ceux-ci, les thérapies géniques, les cellules souches et les anticorps monoclonaux sont des domaines de recherche active qui pourraient compléter ou même remplacer l'ivermectine dans le futur.
La SEP étant une maladie complexe et hétérogène, il est probable que des traitements personnalisés, combinant différentes approches, deviendront la norme dans les années à venir.
Conclusion :
Une approche prometteuse mais encore préliminaire
En résumé, l’ivermectine pourrait avoir un rôle important à jouer dans la gestion de la sclérose en plaques, notamment grâce à ses effets anti-inflammatoires et neuroprotecteurs. Cependant, des recherches approfondies, notamment des essais cliniques à grande échelle, sont nécessaires pour confirmer son efficacité et sa sécurité dans le traitement de la SEP.
Les patients doivent continuer à consulter leurs médecins afin de déterminer les options de traitement les plus adaptées à leur condition.
Bien que l'ivermectine offre un potentiel prometteur, elle doit être considérée dans le cadre d'une approche thérapeutique globale et personnalisée, en tenant compte des dernières avancées scientifiques.
Avertissement : Cet article ne remplace pas un avis médical. Consultez un professionnel de santé avant de modifier votre alimentation ou traitement
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